Des centres d'accueil au Niger, l'autre solution de l'Europe dans la crise des migrants
Par Marie LE DOUARAN publié le 26/06/2015 à 10:26, mis à jour à 10:41
La structure test devrait être mise en place d'ici la fin de l'année pour dissuader les candidats à l'exil vers l'Union européenne. Des solutions de retour dans les pays d'origine devraient être déployées.
Une nouvelle corde à l'arc de l'Europe face à l'afflux de migrants. Un projet, passé plutôt inaperçu, prévoit la mise en place d'ici la fin de l'année d'un centre pour migrants, au Niger, afin de les dissuader de tenter l'aventure jusqu'en Europe. Plus de 1800 personnes sont mortes en 2015 en tentant la traversée.
Le plan reposant sur des "quotas" d'accueil de demandeurs d'asile, qui a crispé les 28 membres de l'UE avant d'être partiellement abandonné, ne concerne en effet que les personnes qui "ont besoin d'une protection", essentiellement des Syriens et des Erythréens. Les réfugiés économiques ne sont pas concernés par ce plan, et ce type de centre leur est plus particulièrement destiné.
Donner une image "réaliste" des chances de succès
Prévu dans l'agenda européen sur les migrations, publié mi-mai, ce premier test sera mené en collaboration avec les autorités nigériennes et l'Organisation internationale des migrations (OIM). Il devrait être situé à Agadez, la capitale du nord du pays, où les candidats au départ vers la Libye puis vers l'Europe affluent. Chaque semaine, 2000 à 4000 personnes, venues du Mali, du Burkina-Faso, de Guinée, du Nigeria... rejoignent Agadez et ses environs. L'OIM estime qu'au moins 100 000 migrants transiteront par le Niger en 2015.
"Depuis la crise libyenne, en 2011-2012, nous avons des centres de transitqui accueillent les personnes qui sont de retour au Niger. L'idée est de s'appuyer sur les structures existantes pour ajouter un service destiné aux personnes sur le départ", précise Giuseppe Loprete, responsable de l'OIM au Niger. Ces lieux proposent déjà une aide psychologique, de la nourriture, l'accès aux premiers soins...
Une campagne d'information a été lancée pour informer les migrants sur la suite du voyage: "Nous essayons de changer leur vision sur la facilité de la traversée ou sur l'argent qui afflue en Europe. Nous savons qu'il y a toujours une partie des migrants qui partiront, mais nous espérons que certains, qui ont parfois déjà tout perdu, ne continueront pas." Face à l'ampleur de la situation, Giuseppe Loprete estime qu'il vaut "mieux faire peur que ne rien faire".
"Il est temps de sortir d'une politique répressive"
Une fois lancé, ce centre proposera aux migrants des solutions pour envisager un retour chez eux. "Nous essayons de les mettre en lien avec des structures d'aide qui existent dans leurs pays d'origine ou de les aider à monter un business plan, par exemple", explique Giuseppe Loprete. En s'appuyant notamment sur les communautés déjà installées, le projet espère développer les tissus économiques locaux. L'aide au retour ne se fait pas avec de l'argent liquide car il peut servir à tout autre chose, notamment à tenter la traversée.
Ces centres peuvent-ils résoudre le problème, comme semble l'espérer l'Europe, ou sont-ils une manière de le repousser hors de nos frontières? "Jusque-là, rien n'a marché pour arrêter le flux de migrants, constate Giuseppe Loprete. Il est temps de sortir d'une politique répressive et de sérieusement regarder les options de développement dans les pays d'origine de ces migrants." La France se montre favorable à cet essai. En visite à Niamey, capitale du Niger, le 15 mai dernier, Bernard Cazeneuve a défendu ce projet comme "l'occasion de porter des politiques ambitieuses de développement pour les migrants et pour les Etats."
Côté nigérien, le ministre de la Justice, Amadou Marou assure que "ce n'est pas un dispositif pour protéger l'Europe, nous le faisons parce que le gouvernement doit prendre ses responsabilités." Mais il sait que ce ne sera pas suffisant. Pour lui, l'UE doit aussi faciliter l'immigration légale. Une proposition posée sur la table des négociations fin avril par Jean-Claude Juncker, qui estime qu'il faut "ouvrir les portes pour éviter que les gens entrent par les fenêtres." Une idée que les 28 ont déjà balayée d'un revers de la main.
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